Le dosimètre photographique sur support papier de type Chassende-Baroz a été utilisé dans la plupart des laboratoires français jusqu’à la fin des années 1970. Ce dosimètre (figure 2.3) comportait un support en carton de 3 × 4 cm sur lequel étaient collées, d’un côté une bande automarquante pour identifier le dosimètre et deux bandes de papier photographique et sur l’autre face deux autres bandes de papier photographique dont une comme témoin de développement. Le tout était placé dans un conditionnement étanche à la lumière et à l’humidité.
Il est logique que pour détecter la présence de photons et en évaluer la quantité on ait fait appel à la photographie.
L’émulsion photographique a été fixée sur différents supports comme le verre pour les premières radiographies, puis sur un film en acétate de cellulose ou le papier. Dans les premiers temps de l’utilisation des rayons X en radiologie médicale ou au début de l’aventure du nucléaire militaire et civil, il y a eu des dosimétries sommaires avec des films de type dentaire sans écran qui étaient extrêmement imprécis mais qui pouvait attester de la présence de rayonnements. Les dosimètres photographiques se sont perfectionnés avec l’utilisation de badges comportant des écrans de matériaux divers permettant d’apprécier l’énergie des photons et améliorer la conversion du noircissement en dose.
Les principaux fabricants de dosimètre photographique ont été les grands industriels de la photographie, Kodak, Agfa, Dupont de Nemours, Fuji, Illford. En France, les différents laboratoires ont utilisé les dosimètres sur support papier de Kodak France selon un modèle créé par Norbert Chassende-Baroz (figure 2.2) et ensuite les dosimètres films de Kodak France et US et Agfa.
LES TECHNIQUES DE DOSIMÉTRIE PASSIVE
L’image de gauche représente le dos de la pochette du dosimètre, au centre les deux émulsions et la plage de marquage, à droite, la troisième émulsion et le témoin de développement.
Il y avait donc trois émulsions de sensibilité différentes permettant de couvrir une grande plage de doses. En effet, si on utilise une seule émulsion très sensible elle est vite saturée et on ne peut pas mesurer les doses supérieures et si elle est peu sensible, le seuil de mesure est trop élevé.
Ce dosimètre était ensuite placé dans un support contenant des écrans comme le plomb ou le cuivre et l’ensemble dans une pochette plastique avec un dispositif d’attache pour le fixer sur le vêtement du porteur.
La nature des écrans et les protocoles de traitement de ces dosimètres ainsi que les modes de calibration étaient variables selon les laboratoires comme nous le verrons aux chapitres 6, 7, 8, 9, 10 et 11.
Une fois développés et fixés, ces dosimètres présentaient des noircissements ou densités optiques qu’il fallait mesurer pour déterminer la dose reçue. Ces mesures étaient effectuées avec des densitomètres à réflexion. Un faisceau lumineux d’intensité de référence était projeté sur les différentes parties du dosimètre et on mesurait l’intensité de lumière réfléchie, le pourcentage de lumière réfléchie étant lié au noircissement et donc à la dose reçue par le dosimètre.
Ce type de dosimètre, que l’on a rapidement appelé « dosifilm », est apparu dès le début des années 1970 et cette dénomination est encore utilisée alors qu’il n’y a plus en France de tels dosimètres depuis le début des années 2000 !
Il y eut d’abord des dosimètres comprenant dans la même enveloppe deux supports sous forme de film, l’un recouvert d’une émulsion sensible (« rapide ») Figure 2.3 – Dosimètre photographique Chassende-Baroz.
pour mesurer les doses faibles et l’autre avec une émulsion moins sensible (« lente ») pour les doses plus élevées.
Ensuite ce dosimètre était, comme le dosimètre papier, placé dans un étui contenant des filtres et une enveloppe plastique. Le mode de traitement appartenait au laboratoire qui les fournissait.
Ces dosimètres Kodak type 3 et Agfa ont été utilisés surtout dans un premier temps pour des raisons économiques, le dosimètre papier fabriqué à Vincennes par Kodak France étant nettement plus cher. Cependant le fait qu’il y ait deux films par dosimètre est devenu un obstacle pour les laboratoires les plus grands car, au cours des années 1970, le nombre de travailleurs surveillés a crû très rapidement en raison notamment de l’essor du nucléaire civil.
Vers 1975 est apparu le dosimètre Kodak type 2 qui avait la particularité de présenter les deux émulsions comme le Kodak type 3 décrit sur la figure 2.4 mais sur un seul film, avec l’émulsion rapide sur une face et l’émulsion lente sur l’autre (schéma ci-dessous). Le gros avantage était qu’il y avait deux fois moins de films à développer mais l’inconvénient était que lorsque l’émulsion rapide était saturée, à partir de 3 mSv, il fallait l’enlever par « grattage » pour pouvoir lire l’émulsion lente sur l’autre face. Heureusement cette opération n’était nécessaire que pour des doses élevées qui n’étaient pas très fréquentes (environ 10 % des dosimètres).
https://www.radioprotection.org/articles/radiopro/pdf/2011/05/radiopro110025-s.pdf