C’est d’une autre inspiration que relève l’Aladin écrit par Ernst Jünger. Le Problème d’Aladin est l’avant-dernier roman de l’écrivain.
L’histoire est celle d’un personnage, Friedrich Bahro, issu de l’aristocratie silésienne (région de Pologne). À un moment de sa vie, il se trouve totalement démuni. Après diverses tentatives pour s’en sortir, il se résout à aller voir son oncle Fridolin pour lui demander un travail dans son entreprise funéraire. Friedrich est chargé de contacter les familles des défunts pour organiser les funérailles. C’est alors qu’il rencontre des amis qui partent du constat que la mort est caduque puisque les tombes n’ont pas l’assurance de la perpétuité. Ils décident ensemble de monter une société qui gérera la mort à l’échelle planétaire. Le projet grandiose est de faire un cimetière où les gens reposent éternellement. Ils fondent une nouvelle société « Térestra » et cherchent un terrain pour l’installer ; c’est en Cappadoce que la société s’établit. Friedriech est nommé directeur de l’entreprise. La réussite de la société est telle que Friedrich est en butte à des hallucinations au cours desquelles il rencontre Farès (alias le magicien). Dans son délire, il s’aperçoit que la caverne d’Aladin jouxte les cavernes de Cappadoce et que la lampe qui est dans la caverne d’Aladin est en étain tandis que la lampe qui éclaire les locaux de l’entreprise est en uranium. L’entreprise continue à se développer à tel point qu’il faut engager un nouveau dirigeant. Friedrich reçoit de Chine une candidature qui correspond étrangement à ce qu’il recherche. Elle est signée Farès, lequel lui donne rendez-vous. Friedrich (Aladin) va à sa rencontre tout joyeux, à l’idée de lui confier la direction de l’entreprise et de se libérer ainsi de son fardeau (la lampe).
https://journals.openedition.org/feeries/121?lang=en#ftn20
« La lampe d’Aladin était faite d’étain ou de cuivre, peut-être d’argile seulement. Le texte de Galland ne nous dit rien là-dessus – nous apprenons seulement qu’elle était suspendue à la voûte d’une grotte. On ne l’allumait pas, mais on la frottait pour que le génie apparaisse. Il pouvait en une nuit édifier des palais ou ravager des villes, selon que l’ordonnait le maître de la lampe. Elle garantissait la souveraineté jusqu’aux limites du monde connu de la Chine jusqu’à la Mauritanie, Aladin préférait l’existence d’un petit despote. Notre lampe est faite d’uranium. Elle pose le même problème : l’afflux de puissance titanique. »
Ernst Jünger, Le Problème d’Aladin, trad. par Henri Thomas, éd. Ch. Bourgois, Paris, 1983. Jünger écrit ce roman à l’âge de 88 ans, juste avant Les Ciseaux qui seront publiés en 1990.